Hier, nous étions le 25 avril 2019… Et je suis intervenue dans une conférence TEDx.
C’était le premier TEDx de La Baule… Et j’ai abordé le portage (sous-tendu de bienveillance, of course!).
Je te propose un article, qui reprend ce que j’ai dit au TEDx, en plus complet. 😉
Parce qu’une conférence n’est pas un article…!
Voici ce TEDx: https://www.youtube.com/watch?v=8Ft_-xWmK9w&t=248s
Tu as remarqué ?
L’humain a tendance à lutter contre sa pilosité… pourtant, la fourrure est bien pratique à de nombreux mammifères.
En plus, nous sommes bipèdes… Et donc nous avons une stature étroite… Or, l’ampleur de la tête du petit d’humain est majeure. Est-ce que ce « dilemme obstétrical » est juste ?
Le fait est que l’accouchement de l’humain parmi les plus douloureux.
Et les bébés naissent… assez peu débrouillards (même s’ils ont déjà moult compétences incroyables!).
Bref, c’est ça, l’humain! Et les bébés sont, comme tous les représentants de son espèce, un « porté passif ». ça veut dire qu’ils n’ont pas le tonus musculaire pour s’agripper. Notre absence de fourrure est donc justifiée (mais cela n’impose en rien d’être imberbe! 😉 )!
Mais ça veut dire que je dois être outillée et avoir assez de connaissances pour agir avec de petit humain. Ça fait tout de même 1.8 millions années que l’Homo Sapiens doit trouver un moyen de se déplacer avec son petit.
Autant dire que les moyens de portage sont diversifiés ! Mais ce n’est pas comme si les hominidés que nous étions, avaient eu le choix : à l’époque, nous étions nomades !
Il n’était pas possible de poser les bébés à terre : ils auraient été à la merci des divers prédateurs, des insectes. Ils pouvaient potentiellement être soumis à des températures qui auraient influencé leur propre homéostasie.
Tu vas me dire que c’est bien joli, que nous sommes sédentaires, dans des logements salubres (pour la plupart), à l’abri des prédateurs… et qu’il est d’usage de déposer les bébés dans des couffins et dans leur lit pour qu’ils dorment.
Il est d’usage, oui…
Mais les usages occidentaux n’ont-ils pas perdu de vue certaines attitudes totalement nécessaires aux bébés humains, comme le portage et l’allaitement (d’ailleurs, je parle ici du choix entre biberons et allaitement )?
L’Occident a perdu cette tradition ces deux derniers siècles.
Cela peut paraître étonnant mais… C’est l’attrait des signes extérieurs de richesse qui a fait tomber le portage en désuétude.
Entre les dogmes des religions chrétiennes et les évolutions culturelles, les enfants sont intentionnellement distancés de leurs mères (j’en parle dans mon article sur le cododo).
Dès le 18ème siècle, l’allaitement a commencé à être remis en question : cela faisait trop miséreux d’allaiter soi-même ses propres enfants.
Alors, forcément, avec les placements en nourrice (chez elle mais d’abord au domicile parental), tant l’allaitement que le portage n’ont plus eu la côte socialement.
Mais voilà… La culture, la société, les bébés, eux, s’en fichent totalement !
La physiologie du bébé humain n’évolue pas en suivant les coutumes sociales. Il reste toujours dans ce même état de dépendance extrême, craignant l’environnement qu’il découvre à peine et cherchant à se rassurer par ce qu’il connaît : les mouvements de sa mère, son odeur, les battements de son cœur, une position fœtale, un peau-à-peau et un contact contenant.
D’ailleurs, tout le monde s’accorde là-dessus : « Ils se calment dès qu’ils/elles sont dans les bras ! »
Étonnamment, au lieu d’être perçu comme un constat logique, c’est perçu comme une contrainte voire un problème !
C’est à ce moment-là que l’on prend conscience du précipice entre les normes sociales occidentales et la connaissance des besoins physiologiques des bébés… Et surtout, des manière simples et efficaces pour y répondre.
Aujourd’hui, je vais aborder l’impact du portage sur la vie de vos enfants et la vôtre tant en termes de bienfaits que de sérénité.
Certains préalables s’imposent…
Depuis l’origine de notre espèce Homo Sapiens, la constitution du nouveau-né est identique : ils sont mis au monde après environ 9 mois de gestation (quand tout se passe bien).
Notre cerveau humain nous distingue des autres mammifères, puisqu’à la naissance, il est neurologiquement immature. La taille du cerveau d’un nouveau-né correspond à 23% de celui d’un adulte. Quand le bébé a un an, son cerveau a déjà doublé de taille, et à 3ans, il a 90% de la taille d’un cerveau adulte. Comparativement, les autres mammifères naissent avec un cerveau développé à 80% en moyenne.
(je laisse le lein passionnant d’une page fb Société d’Histoire de la Naissance, qui nous laisse découvrir le 22 mars 2019, un article de July Bouhallier : « Paléoanthropologie : le dilemme obstétrical n’a pas eu lieu » )
Pour être précise : Les mammifères ont été classés selon leurs modes d’adaptation à leur environnement au moment de la naissance. Il y a trois catégories :
o Les nidifuges : les petits arrivent à se déplacer comme les adultes dans les heures qui suivent la naissance (poulains, veau, antilopes…). Ils restent toujours près de leur mère.
o Les nidicoles : Les petits naissent sans poils, avec les yeux et les conduits auditifs fermés. Le lait doit apporter un sentiment de satiété suffisant pour qu’ils puissent se passer ponctuellement de leur mère. Ils sont toujours plusieurs ce qui permet d’avoir de la chaleur (chat, souris…).
o Les Portés : ce qui est le cas des primates, des marsupiaux et de l’Humain. C’est un corps de qui devient « le nid », capable de pourvoir à tous les besoins. Bernhard Hassenstein a introduit le terme du « primate porté » dans la biologie comportementale.
Autant dire que le bébé humain est totalement prématuré. Sa première année est comme une grossesse extra-utérine. Cela lui permettra d’accéder à des compétences motrices comparables à nos congénères hominidés que sont les gorilles, les chimpanzés et l’orang-outang à la naissance.
Il est primordial de prendre en compte que la maturation cérébrale concerne en grande partie le cortex préfrontal : c’est cette partie du cerveau qui nous distingue des autres espèces par son ampleur. Il est le siège de nombreuses facultés dont celle de la régulation émotionnelle, des comportements sociaux et du raisonnement, entre autres.
A la naissance, les bébés n’ont aucune compétence pour gérer les aléas du quotidien et se dire : « Ok ! Là, mes parents sont occupés, je vais rester zen jusqu’à leur retour ! »
Au contraire, dans le cerveau du bébé humain actuel s’active la même alarme que lors des prémices de notre espèce nomade : « AU SECOURS ! Je suis seul et potentiellement entouré de dangers contre lesquels je ne peux rien ! ».
Cette connaissance de l’immaturité cérébrale des enfants a un impact sur les attentes que les parents peuvent avoir : Il n’y a ni comédie ni caprices ou de manipulation (j’aborde l’occurence des mensonges dans cet article).
Les bébés ont besoin d’être contre nous pour être apaisés… et pour apprendre à s’apaiser !
Leurs besoins nécessitent d’être entendus et pris en compte le plus rapidement possible pour qu’ils puissent renforcer leurs réseaux neuronaux favorables à la gestion émotionnelle et au sentiment de sécurité.
Grâce à un accompagnement prévenant et sécurisant, les petit.e.s d’humains vont évoluer et grandir de manière optimale : ils parviendront à maîtriser leurs émotions vers 5 ou 6 ans, au mieux, sauront le verbaliser (si on leur a enseigné), commenceront à s’adapter à leur environnement culturel en intériorisant les codes sociaux… Tout cela n’est possible que si les enfants sont accompagnés dans la bienveillance !
Quel rapport avec le portage, me direz-vous ?
Eh bien… TOUT !
Le portage et le peau-à-peau sont les attitudes les plus adaptées aux petits d’humains.
Cela fait intrinsèquement partie du nouveau-né, puisqu’il a été porté au sein de sa mère depuis sa conception.
Il ne connaît que le mouvement, les changements d’ambiances filtrées par la paroi abdominale et le contact contenant des parois utérines et du cordon ombilical (qu’il tète souvent).
Le portage est le moyen privilégié pour recréer les conditions les plus proches de la vie in utero, de manière à ce que les bébés puissent être rassurés alors qu’ils découvrent la vie aérienne.
Grâce à cette pratique, les bébés bénéficient de moult avantages pour leur développement.
Par exemple :
– Les bébés portés en position physiologique (comme cela devrait toujours être le cas, je laisse d’ailleurs un lien vers un article reprenant les bienfaits du portage physiologiques) ont moins de coliques que ceux qui ne le sont pas. Le repli des jambes sur le bas ventre et le massage créé par les mouvements de la porteuse ou du porteur soulage le bébé. Ce portage agit également en prévention de problèmes de hanches.
– Concernant la tonicité musculaire : avec les mouvements de la mère, les réflexes nerveux et musculaires du bébé réagissent à chaque changement de l’équilibre. Il va développer son oreille interne, et ainsi son sens de l’équilibre personnel.
Donc non, le portage ne minimisera pas ses compétences à se déplacer de façon autonome, au contraire ! Il y a aussi juste des composantes interpersonnelles propres à la personnalité et à la génétique de chaque individu.
– Avant ses 2 mois, le bébé ne parvient pas à réguler sa température corporelle. Autant dans le désert avec les Touaregs que chez les inuits sous la neige, le portage est tout indiqué pour les aider à réguler leur température !
– Les rythmes de sommeil d’un nouveau-né n’ont rien à voir avec celui des adultes : ils n’ont pas encore acquis le rythme circadien (alternance jour/nuit).
Un bébé porté durant la journée, qui dort également en portage (chose que préfère la plupart des bébés!), va acquérir plus aisément cette alternance. Il vit, dans son corps, une réelle distinction : la journée, il dort bercé par le mouvement et en lumière ; la nuit, il est aux côtés de ses parents dans le calme et l’obscurité.
La différence est flagrante pour le bébé !
Est-ce que le mouvement les gêne pour dormir ? … Ou les bruits du quotidien ?
Après 16 mois d’expérience personnelle, je vous assure que les enfants dorment le temps dont ils ont besoin, quand ils en ont besoin. Ma fille a eu des périodes de sieste de 30/40min, puis d’une heure trente… Cela change encore : « le » rythme du bébé n’existe pas… Il évolue constamment !
Je propose d’ailleurs la lecture de cet article concernant le sommeil en dessous de 3 ans.
Le portage permet le sommeil au moment où les bébés le décident, en suivant uniquement leur rythme biologique. Ils réduisent ainsi l’occurrence des troubles du sommeil.
– En plus de cela, les bébés portés pleurent singulièrement moins que ceux qui ne le sont pas.
Les bébés se sentent protégés, ils n’ont pas besoin de pleurer pour se faire comprendre de leurs parents.
J’en profite pour affirmer que le fait de laisser pleurer un bébé n’a aucune vertu ni aucun avantage. Les recherches concernant les neurosciences affectives sont claires : ne pas réagir aux pleurs d’un bébé engendre une augmentation drastique des taux d’hormone de stress comme le cortisol et impacte défavorablement leur développement émotionnel et neuronal. Un enfant n’apprend rien en pleurant !
– Le portage est aussi une aide à la prévention des aplatissements du crâne (souple à la naissance, et heureusement si vous voyez ce que je veux dire !), les bradycéphalies et plagiocéphalies sont devenues courantes avec les prescriptions de coucher les bébés sur le dos.
Si cette mesure est une vraie plus-value concernant la Mort Inattendue du Nourrisson, les habitudes occidentales laissent penser que les bébés doivent être posés pendant toutes leurs phases de sommeil. OR, c’est la récurrence de cette position couchée qui amène à certaines déformations crâniennes. Celles-ci peuvent avoir des conséquences sur le développement cognitif et moteur des enfants et nécessiter des prises en charge parfois lourdes !
Alors, en prévention : le portage est salvateur!
Maintenant que vous savez que le fait d’être porté n’est que bienfait pour les bébés.
Il y a quand même une autre personne d’intérêt. Celle qui porte !
Parce que le portage offre de nombreux bénéfices pour les jeunes parents.
Tout d’abord, le contact peau-à-peau est primordial dans la création des liens avec les bébés. Il favorise la sécrétion d’ocytocine et d’opioïdes, des hormones et neurostransmetteurs qui jouent un rôle prépondérant dans l’établissement des liens affectifs.
Le portage peut paraître difficile, au premier abord. (En réalité, c’est comme faire ses lacets : au début, ça semble complexe mais… C’est un coup de main à prendre !).
Très vite, tu pourras être rassuré.e sur votre ta compétence à pouvoir réconforter ton enfant…
Cette proximité avec le bébé permet d’être en lien avec ses besoins : les pleurs sont évités, puisqu’il est possible de les comprendre plus vite… Avant qu’ils ne s’énervent et pleurent!
Saviez-vous que le portage réduit l’occurrence ou la gravité des dépressions post-partum. Henrik Norholt a mené une étude qui démontre que les symptômes de dépression post-partum sont réduits chez les mamans pratiquant le portage. Un bel avantage, ne trouvez-vous pas ?
Le portage est LA manière utilisée de tout temps pour permettre aux bébés d’être réconfortés pendant que leurs mères (traditionnellement, mais toutes les configuration familiale sont possibles) reprennent leurs activités et puisse articuler les besoins d’un nouveau-né avec la vie d’un aîné, par exemple!
Merci quand même à l’entourage de suppléer la jeune accouchée, c’est indispensable qu’elle puisse bénéficier de soutien… pour câliner son tout-petit!
Pas d’inquiétude, le lien avec les autres personnes se construira aussi, au début, le lien mère-enfant est primordial pour que chacun d’eux atterrissent dans leurs nouvelles attributions, c’est-à-dire, respectivement, responsable d’un humain et être aérien à part entière.
La vie avec un bébé est un appel à l’instant présent. Cela peut-être considérer une pratique de Pleine Conscience au quotidien.
Le portage et le parentage proximal correspondent à une courte partie de la vie d’un enfant. Et c’est une phase précieuse !
C’est l’occasion de prendre le temps, d’Être au lieu de toujours « faire avec efficacité ».
A bientôt, pour de nouvelles découvertes curieuses!
Références :
– Le concept du Continuum de Jean Liedloff, Ambre Editions (21 mars 2006)
– Serre-moi Fort: Comment élever vos enfants avec Amour. Broché (2017)
– Materner: du premier cri aux premiers pas. Blandine Bril et Silvia Parrat-Dayan. Edition O. Jacob mars 2008
– Peau à peau: Techniques et pratiques du portage. Ingrid Van Den Peereboom. Editions Jouvence
– Porter bébé: Avantages et bienfaits. Claude Didierjean-Jouveau. Editions Jouvence poche
Je t’invite aussi à lire deux articles: « Tu vas en faire un bébé-bras » et « le quatrième trimestre de grossesse ou la découverte d’un nouveau monde« , qui aborde le portage et la vie quotidienne avec un.e bébé.
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